La femme de hasard
"La femme de hasard" de Jonathan Coe
Poche - 183 pages - 4,85 euros
Note : 07/10
Résumé :
Maria, une jeune fille de milieu modeste, vit aux environs de Birmingham. Indifférente par choix, indécise par nature, elle trouve que l'on fait beaucoup de bruit pour peu de chose. Que valent les succès aux examens et les déclarations de Ronny qui l'aime désespérément, que penser des amis de classe avec leurs vacheries et leurs cancans... Seul le chat, un exemple d'indifférence satisfaite, lui donne à penser qu'une forme de bonheur est possible. Mais comment être heureux lorsque votre vie est une succession d'accidents, de hasards...
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Lorsqu'elle apprend qu'elle est admise à Oxford, Maria n'éprouve rien de particulier.
Oh certes, elle est contente d'avoir réussi, sinon elle n'aurait pas tenté de s'y inscrire. Mais disons que ce qui l'ennui le plus dans cette histoire, c'est qu'elle va devoir faire face à l'enthousiasme débordant de sa famille à l'annonce de cette nouvelle.
Et l'expression des sentiments, Maria, ce n'est pas trop son truc.
Ronny aussi est accepté à Oxford. Ronny c'est son amoureux. Enfin..... il aimerait bien.
Fou d'amour pour elle, c'est le genre de garçon qui n'hésite pas à faire plus d'une heure de trajet pour lui tenir compagnie dans le bus qui la ramène chez elle, puis repartir pour rentrer chez lui, seul. Sans même avoir obtenu un baiser.
Aucune lisaison entre eux. Maria n'est pas amoureuse, Ronny le sait, mais ne désespère pas de la voir changer d'avis.
Et comme Maria l'aime bien son Ronny, qu'il est bien gentil après tout, ma foi, ils sont ce que l'on pourrait appeller des "amis".
A Oxford, Maria partage sa chambre avec Charlotte, mais aucune infinité ne lie les jeunes filles. Elles sont bien trop différentes.
Il faut dire que Maria n'est pas très liante. Elle n'est pas méchante, pas désagréable, plutôt jolie, mais elle ne s'intérêsse pas à grand chose dans la vie. Et pas particulièrement non plus aux gens.
Elle avance dans la vie sans rien en attendre. Elle "suit" sa vie, histoire de voir où elle va la mener.
Elle n'est pas malheureuse, mais elle n'est pas heureuse non plus.
Et puis d'ailleurs, c'est quoi être heureux ?
Second livre que je lis de cet auteur et que je souhaitais découvrir un peu plus après avoir lu "Testament à l'anglaise" qui m'avait bien plu.
Et celui ci, c'est Sandra, ma swappée qui me l'a offert. Alors merci Sandra. Merci pour ce livre et l'agréable moment qu'une fois de plus j'ai passé avec Jonathan Coe.
Le goût que je me suis découvert pour cet auteur se confirme. J'espère qu'il ne fera que grandir à mesure que je découvrirais ses oeuvres.
Il s'agit là de son tout premier roman. Peut-être un peu moins abouti que "Testament..", mais si peu.
J'y ai retrouvé l'humour assez particulier dont il fait preuve. Son cynisme. J'aime le regard qu'il porte sur les gens, sur la société, sur la vie en générale.
J'aime la façon dont, dans ce roman, il s'adresse au lecteur. J'ai eu l'impression d'être un peu plus mise à contribution, prise à partie.
Sa manière d'écrire les choses avec de jolis mots, de belles phrases, pour d'un seul coup y aller franco avec un bon gros mot ou une expression qui détonne.
Quant à son personnage, Maria, elle m'a beaucoup plu également. Par moment je me suis vraiment sentie proche d'elle. Elle est très "space", il faut bien le dire, mais dans certaines situations, je me suis reconnue à certains moments de ma vie.
Son inertie face à la vie pourrait donner envie de la secouer, je peux comprendre qu'on puisse la trouver insupportable, prendre son caractère pour de la suffisance, mais ce n'est pas ce que j'y ai vu. Ou ce que j'ai voulu y voir. Je l'aime bien moi cette Maria. J'aurais aimé la rencontrer et discuter avec elle.
Extrait :
"...Car le bonheur en soi, se disait Maria, n'avait guère de poids comparé au temps passé soit dans sa perspective, soit dans son souvenir. En outre, l'expérience immédiate du bonheur paraissait complètement détachée de l'expérience de son attente ou de son souvenir. Jamais elle ne se disait, quand elle était heureuse :"c'est ça le bonheur", et jamais donc elle ne l'identifiait comme tel au moment où elle le vivait. Ce qui ne l'empêchait pas de penser, quand elle le vivait, qu'elle avait une idée très claire de ce qu'il recouvrait. La vérité, c'est que Maria n'était vraiment heureuse que lorsqu'elle pensait au bonheur à venir, et je crois qu'elle n'était pas la seule à adopter cette attitude absurde. Il est plus agréable, allez savoir pourquoi, d'éprouver de l'ennui, ou de l'indifférence, ou de la torpeur, en se disant : dans quelques minutes, quelques jours, quelques semaines, je serai heureux, que d'être heureux en sachant, fût-ce inconsciemment, que le prochain sursaut intérieur nous éloignera du bonheur. L'idée du bonheur, qu'il soit prospectif ou rétrospectif, éveille en nous des émotions beaucoup plus fortes que la seule émotion du bonheur..."